vendredi 2 mai 2014

Le début de ma nouvelle vie

 
Il y a eu un avant. 
 
J'étais blonde, j'avais les yeux bleus et j'étais très intelligente. 
 
Il y aura un après. 
 
Je serai toujours blonde, j'aurai toujours les yeux bleus et je serai toujours très intelligente (voire même plus encore). 
 
Rien n'aura changé extérieurement (oui, l'intelligence est extérieure). 
 
Mais, intérieurement, tout sera différent. 
 
Car la vie vous réserve parfois de drôles de surprises.
 
Et je ne parle pas que des pains-surprises qui, certes, sont très bons (ceux de Picard notamment),  mais qui ne concentrent pas à eux seuls toutes les formes de surprises - n'en déplaisent à certaines personnes dont les noms me viennent à l'esprit mais que je tairai ici par respect pour elles et pour le reste du monde. 
 
Une surprise, ça peut être une main qui se tend quand vous étiez en train de sombrer tout au fond de la piscine du bout du tunnel du rouleau, dans une bonne grosse vieille dépression des familles. 
 
Et paff, c'est la vie qui renaît. 
 
Une surprise, ça peut aussi être un bloc de béton qui se détache d'un immeuble et qui atterrit pile poil sur votre pied avec toute sa force de gravité. 
 
Et bing, c'est la vie piétonne qui s'en va. 
 
Des surprises, à vrai dire, on en a tous les jours. 
 
Mais il y en a qui sont tellement énormes qu'elles font du jour où elles arrivent une date hors norme qui signifiera bien plus pour vous qu'un simple quantième d'un mois quelconque d'une année lambda. 
 
Le 1er mai fait dorénavant partie de mes dates à moi. 
 
Rendez-vous était pris pour une soirée chez Maud, avec quelques amies, pour fêter sa thèse de médecine (il faut bien fêter des choses dans la vie). 
 
Comme je suis une remarquable amie et que j'avais été chargée du dessert (allez savoir pourquoi, on me confie toujours le dessert), je me suis dit que, plutôt que de faire semblant d'avoir cuisiné un Savane Papy Brossard (oui, oui, j'ai aussi fait l'emballage), je pouvais essayer de faire un vrai gâteau, avec de la farine, du sucre et même des oeufs. 
 
Et ça tombait bien parce que je n'avais pas envie de travailler.
 
Or la cuisine a le don de passer, à mes yeux de professionnelle oeuvrant pour le bien commun depuis son propre domicile (de préférence en tailleur sur son clic-clac), pour une excuse infiniment plus respectable que celle que je trouverais dans une séance lecture de Stylist magazine en prenant un bain pendant une heure, ou dans une séance de décalcomanies sur le thème de Babar (pendant une heure aussi). 
 
N'allez pas me demander pourquoi, cela doit avoir vaguement rapport avec le fait qu'en me consacrant à une telle activité, j'ai la ferme conviction d'oeuvrer aussi un peu pour le bien commun, du moins pour le bien commun de ceux qui en partageront le résultat, et ma conscience a donc moins de difficulté à fermer les yeux sur le manque total de sérieux que cela dénote de ma part. 
 
Et comme je n'avais vraiment pas envie de travailler (mais alors vraiment pas), je me suis dit : plutôt que de faire mon gâteau au chocolat express pour la 107e fois, pourquoi ne pas tenter une nouvelle recette ? 
 
Et pourquoi pas, tiens, une recette de crumble
 
Comme ça, je peux garder la même quantité de beurre, ce qui me permettra de conserver mes acquis, tout en incluant un élément fruitier qui apportera une touche de légèreté au dessert. 
 
Au final, je me suis certes un peu trompée dans le dosage de cet ingrédient, mais heureusement, ça ne s'est pas vu plus que ça une fois mélangés les pommes, la cannelle, le citron, le sucre vanillé, le sucre cassonade et la farine, comme ont fait au moins les 1558 personnes qui ont réalisé la recette avant moi et qui l'ont notée 5/5. 
 
Quelques heures plus tard, après être allée me perdre dans un lointain endroit qu'on appelle le XVIe arrondissement, j'ai sorti mon gâteau. 
 
Je l'ai coupé. 
 
Je l'ai servi. 
 
Et là, plus personne n'a parlé pendant bien dix minutes / une demi heure, le temps de se recueillir, pleurer, se moucher un peu, repleurer encore, s'essuyer les yeux et encore repleurer. 
 
Qu'est-ce que tout ça a changé dans ma vie ? 
 
Oh, pas grand chose. 
 
C'est juste que, désormais, je sais à quoi ressemble le paradis. 
 
Il a un goût plutôt sucré et caramélisé.

  
(Trop d'émotion... no comment !)

6 commentaires:

  1. Le premier crumble que j'ai fait restera, de source familiale, le meilleur. Depuis, je rame, pour les convaincre, que les crumbles successeurs sont presque au niveau du 1er.

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  2. J'en ai l'eau à la bouche. Vraiment.

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  3. Mais pourquoi ne suis-je pas capable d'obtenir un tel effet sur mes convives ? Serait-ce qu'ils veulent me cacher leurs émotions, ou plutôt qu'ils n'en sont pas dignes ?

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  4. J'ai eu l'occasion un jour (pas si lointain) de goûter à cette recette. Et je confirme, elle vaut le détour !

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  5. Cette recette de crumble aux pommes étant proposée par un certain félin qui tousse et qu’il faut entre autres ingrédients tousser dans le crumble lors de sa préparation. Peut-être ne dois-tu pas crier victoire culinaire trop tôt. Les moucheries et yeux larmoyants de tes amis me semblent plutôt être les symptômes avant-coureurs d’un gros rhume. C’est bon aussi le Papisavane !

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  6. Le problème, pour moi, c'est que je fais ça au détriment de l'ambiance. Les gens me disent souvent, en repartant d'une soirée chez moi, qu'ils ont bien mangé, mais que par contre, pour le reste, ils se sont ennuyés comme des rats morts. On ne peut pas tout avoir dans la vie !

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